En 1911, Guillaume Apollinaire est incarcéré durant six jours, du 7 au 12 septembre, à la prison de la Santé, à Paris, quartier du Montparnasse dans le quatorzième arrondissement. Les rebondissements de l'enquête sur le vol du tableau de la Joconde survenu au Louvre le 21 août 1911, le désignent comme éventuel complice du voleur qui réclame une rançon de 150 000 francs...
En 1907, une connaissance de Guillaume Apollinaire, Géry Piéret, qui fut un temps son secrétaire, lui proposa, pour une bouchée de pain, des statuettes phéniciennes, Apollinaire en acheta et en revendit certaines à son ami Pablo Picasso. Après le vol de la Joconde (août 1911) un inventaire effectué au Louvre indiqua que près de trois-cents pièces avaient été dérobées, dont les statuettes achetées par Apollinaire et revendues à Picasso. Inquiétés par ces révélations, Apollinaire et Picasso songèrent qu'il devenait nécessaire de se débarrasser des sculptures en les déposant au siège du quotidien Paris Journal, non sans avoir auparavant imaginé les jeter dans la Seine. Peu après, le fil de l'enquête conduisit à Apollinaire qui fut arrêté et placé en détention provisoire à la Santé, sous mandat de dépôt, le 7 septembre. Le 12 septembre, il fut mis en liberté provisoire mais la relaxe ne fut prononcée que le 19 janvier 1912, lors d'un procès de non lieu.
En 1907, une connaissance de Guillaume Apollinaire, Géry Piéret, qui fut un temps son secrétaire, lui proposa, pour une bouchée de pain, des statuettes phéniciennes, Apollinaire en acheta et en revendit certaines à son ami Pablo Picasso. Après le vol de la Joconde (août 1911) un inventaire effectué au Louvre indiqua que près de trois-cents pièces avaient été dérobées, dont les statuettes achetées par Apollinaire et revendues à Picasso. Inquiétés par ces révélations, Apollinaire et Picasso songèrent qu'il devenait nécessaire de se débarrasser des sculptures en les déposant au siège du quotidien Paris Journal, non sans avoir auparavant imaginé les jeter dans la Seine. Peu après, le fil de l'enquête conduisit à Apollinaire qui fut arrêté et placé en détention provisoire à la Santé, sous mandat de dépôt, le 7 septembre. Le 12 septembre, il fut mis en liberté provisoire mais la relaxe ne fut prononcée que le 19 janvier 1912, lors d'un procès de non lieu.
Le 12 septembre, une confrontation entre Apollinaire et son ami Pablo Picasso eut lieu dans le bureau du juge d'instruction Drioux . Le peintre aurait déclaré au juge qui lui demandait s'il connaissait le poète, qu'il ne l'avait jamais vu (ils se connaissaient depuis 1905). On dit qu'Apollinaire, en entendant cette réponse, était devenu blanc comme un linge. Par la suite, Pablo Picasso admit avoir joué un rôle dans cette affaire.
Pendant les six jours d'incarcération, Apollinaire écrivit quelques poèmes, parmi lesquels ceux copiés ci-dessous.
A la Santé
I
Avant d'entrer dans ma cellule
Il a fallu me mettre nu
Et quelle voix sinistre ulule
Guillaume qu'es-tu devenu
Le Lazare entrant dans sa tombe
Au lieu d'en sorti comme il fit
Adieu adieu chantante ronde
Ô mes années ô jeunes filles
Pendant les six jours d'incarcération, Apollinaire écrivit quelques poèmes, parmi lesquels ceux copiés ci-dessous.
A la Santé
I
Avant d'entrer dans ma cellule
Il a fallu me mettre nu
Et quelle voix sinistre ulule
Guillaume qu'es-tu devenu
Le Lazare entrant dans sa tombe
Au lieu d'en sorti comme il fit
Adieu adieu chantante ronde
Ô mes années ô jeunes filles
II
Non je ne me sens plus là
Moi-même
Je suis le quinze de la
Onzième *
Le soleil filtre à travers
Les vitres
Ses rayons font sur mes vers
Les pitres
Et dansent sur le papier
J'écoute
Quelqu'un qui frappe du pied
La voûte
III
Dans une fosse comme un ours
Chaque matin je me promène
Tournons tournons tournons toujours
Le ciel est bleu comme une chaîne
Dans une fosse comme un ours
Chaque matin je me promène
Dans la cellule d'à côté
On y fait couler la fontaine
Avec les clefs qu'il fait tinter
Que le geôlier aille et revienne
Dans la cellule d'à côté
On y fait couler la fontaine **
IV
Que je m'ennuie entre ces murs tout nus
Et peints de couleurs pâles
Une mouche sur le papier à pas menus
Parcourt mes lignes inégales
Que deviendrai-je ô Dieu qui connais ma douleur
Toi qui me l'as donnée
Prends en pitié mes yeux sans larmes ma pâleur
Le bruit de ma chaise enchaînée
Et tous ces pauvres coeurs battant dans la prison
L'Amour qui m'accompagne
Prends en pitié surtout ma débile raison
Et ce désespoir qui la gagne
Et peints de couleurs pâles
Une mouche sur le papier à pas menus
Parcourt mes lignes inégales
Que deviendrai-je ô Dieu qui connais ma douleur
Toi qui me l'as donnée
Prends en pitié mes yeux sans larmes ma pâleur
Le bruit de ma chaise enchaînée
Et tous ces pauvres coeurs battant dans la prison
L'Amour qui m'accompagne
Prends en pitié surtout ma débile raison
Et ce désespoir qui la gagne
V
Que lentement passent les heures
Comme passe un enterrement
Tu pleureras l'heure où tu pleures
Qui passera trop vitement
Comme passent toutes les heures
VI
J'écoute les bruits de la ville
Et prisonnier sans horizon
Je ne vois rien qu'un ciel hostile
Et les murs nus de ma prison
Le jour s'en va voici que brûle
Une lampe dans la prison
Nous sommes seuls dans ma cellule
Belle clarté Chère raison
Septembre 1911
* Apollinaire occupait la cellule n° 15 dans la onzième division
** Ce poème est une allusion à la promenade matinale dans la cour de la prison, que l'on effectuait toujours en marchant dans le sens inverse des aiguilles d'une montre.
"A la Santé" est publié dans Alcools, aux éditions Mercure de France, en avril 1913
Deux sources pour rédiger cette note:
"Le poète incarcéré: reconstitution", par Franck Balandier
Guillaume Apollinaire de Laurence Campa, biographies nrf Gallimard, 2013
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