La puce
Observe cette puce et note
Combien peu de chose est ce que tu me refuses:
Ayant d'abord sucé mon sang,
Le tien ensuite, elle a mêlé nos sangs en elle.
Tu sais qu'on ne saurait y voir
Honte ou péché, ni perte de virginité;
Pourtant, sans prélude, elle jouit
Et enfle, gorgée de nos deux sangs réunis:
Ceci, hélas, est plus que nous ne pourrions faire.
Arrête! Epargne en une puce
Trois vies! nous sommes presque, non, plus que mariés
En celle qui est toi et moi,
Temple de notre union et notre lit de noces;
Malgré tes parents, ton refus,
Ces murs de jais, cloître vivant, nous ont unis.
Tu peux me tuer, c'est l'usage;
Mais ne vas ajouter suicide et sacrilège
A ce meurtre : trois péchés et trois assassinats.
Cruelle et brusque, as-tu déjà
Empourpré ton ongle du sang de l'innocence?
Quel crime a commis cette puce
Si ce n'est de te prendre une goutte de sang?
Tu triomphes pourtant et dis
Que tu ne t'en sens pas, ni ne m'en sens plus faible.
C'est vrai; tes peurs étaient donc vaines;
En cédant tu perdras tout juste autant d'honneur
Que t'enleva de vie la mort de cette puce.
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