dimanche 15 septembre 2013

Jean-Frédéric Coviaux, peintures

A l'occasion des Journées du Patrimoine, à  Grenoble, j'ai découvert dans un lieu d'exposition un peu original, le Studio 1011,  les peintures de Jean-Frédéric Coviaux.  


La galerie d'art contemporain le Studio 1011, est un appartement d'hôtes situé 4 quai Perrière, sur les rives de l'Isère, en face de la passerelle de bois suspendue. De nombreuses galeries et plusieurs ateliers d'artistes sont installés dans ce quartier situé à  proximité du Musée de Grenoble.   
L'appartement est parfois réservé pour être ouvert au public comme c'est le cas pour les Journées du Patrimoine et les journées d'Art Contemporain, sinon proposé à la location le reste de l'année. Les hôtes profitent d'une exposition d'art en cours ainsi que de pièces de mobilier contemporain réalisées par des artistes. 
Les bénéfices des locations permettent aux propriétaires du lieu d'engager des actions pour  soutenir les artistes dans leurs démarches de création, de diffusion et même de les aider à déposer des brevets (mobilier), on peut ainsi définir leur action auprès des artistes comme une forme de mécénat.




 
 Jean-Frédéric Coviaux peint à l'aquarelle ou à l'encre (encre de Chine) sur papier, il mélange les techniques pour obtenir un rendu estompé, précis et hyper-réaliste, mais il pratique aussi des projections qui créent une matière très intéressante, complexifiant la perception de ses peintures.  En se rendant sur le blog de l'artiste ( j'indique le lien plus bas), on peut constater l'évolution de sa technique, mais aussi de ses thématiques.  Il semble très attaché au portrait et à l'exploration de paysages.  Si dans les peintures plus anciennes, on semble reconnaître les massifs montagneux qui entourent Grenoble, les peintures les plus récentes, paraissent au contraire relever de l'exploration de paysages plus intérieurs et plus abstraits, formes informes qui s'inspirent de la tache, de l'aléatoire et des surprises des éléments voisinant avec les structures solides de formes géométriques construites et régulières.  
Peut-être est-ce pour l'artiste une manière, une nécessité, d'explorer les contraires, les oppositions, une préoccupation affirmée dans l'exposition accrochée dans le Studio 1011, appelée " Etats-Unis - Soleil levant", qu'il présente de la manière suivante: "se font face l'esprit des USA et l'esprit du Japon".  
Effectivement, dans la mise en scène de l'accrochage, sur les murs de l'appartement qui se font face, la partie gauche est réservée à l'accrochage de portraits en couleur d'étudiants américains des années 80, alors que la partie droite est consacrée à des portraits en noir, blanc et gris de japonais pour la plupart en costumes traditionnels provenant d'un album de famille ( des photos datant des années 20?) acheté sur le net par l'artiste.  Le face à face est manifeste, les oppositions évidentes et soulignées.  Jean-Frédéric Coviaux dit vouloir volontairement, mais aussi intuitivement, suggérer aux visiteurs, par le moyen de la confrontation des portraits, les oppositions de ces deux civilisations, leurs antagonismes... nombreux.  
Son propos est aussi (j'espère ne pas déformer ce qu'il m'en a dit) de dénoncer les effets de l'occidentalisation du monde, sous l'hégémonie américaine faisant vaciller les cultures traditionnelles des pays qui ayant une histoire ancienne, sont écartelés entre leur histoire (et leurs traditions) et l'a-culture qui tient lieu de culture à la société contemporaine américaine.  Ces portraits d'étudiants de prestigieuses universités américaines, peints d'après des photos des  fameux "Yearbooks" qui  invitent chaque étudiant à poser , révélent les codes implicites auxquels la jeunesse adhère, à commencer par la culte de l'individu(alisme) et de l'apparence ( handsome & friendly).  J'ajouterais que c'est cette génération d'étudiants et la suivante qui ont imaginé  "The facebook" projet ( à retrouver  dans le film "The Social Network " de Aaron Sorkin, réalisé par David Fincher, racontant l'invention de Facebook et l'idéologie qui la soutend), à méditer  donc .... J'ai regretté par moment l'aspect un peu manichéen de la présentation de l'exposition qui pouvait laisser place à une vision un peu trop stéréotypée des Etats-Unis ... Mais il est un fait que lorsqu'on regarde ces peintures faites à partir de photos d'étudiants, on est frappé par leur ressemblance, au delà du sexe, de la couleur de peau et de l'origine ... La confrontation avec la société japonaise pointe des antagonismes forts ... Voilà une belle réflexion lancée,  mais le lieu n'était certainement pas assez vaste pour proposer des contre-points et des dialogues pluriels, avec d'autres  oeuvres et des regards croisés. Cela dit, on peut regarder cette exposition comme un point de départ et non comme un point final...un questionnement intéressant est amorcé ici sur la question de l'identité du " je " en tant qu'individu singulier  et l'dentité induite par le milieu culturel qui semble absorber ou influencer fortement la première ( c'est du moins ce qui apparaît dans les peintures des étudiants américains ).  Il y avait beaucoup de propositions pour solliciter la réaction  du visiteur  dans cette exposition. Une très belle découverte !

Pour ceux qui habitent à Grenoble, l'exposition est encore ouverte au public ce dimanche 15  septembre 2013... sinon, n'hésitez pas à visiter le blog de l'artiste pour découvrir ses travaux de 2012 à aujourd'hui, suivez ce lien:
http://jeanfredericcoviaux.blogspot.fr/

2 commentaires:

Pierre Rostaing a dit…

1011 merci
... du Studio
pour ce remarquable article !

11

pierre vallauri a dit…

En suivant le commentaire précédent: remarquable article en effet qui donne l'envie lors d'un passage par Grenoble de rendre visite à cet artiste... ou d'envisager de l'inviter à venir exposer par ici.
Va falloir trouver la possibilité de le faire par d'autres voies que celles que nous connaissions.