le blog de florence laude "L'artiste nous prête ses yeux pour contempler le monde" Arthur Schopenhauer
lundi 27 février 2017
vendredi 24 février 2017
Alain Johannes, "Eyes to the sky"
Premier titre de l'album Spark, 2010 (premier album solo d'Alain Johannes)
mercredi 15 février 2017
Un article dans la Provence / expo FAIS MOI UN SIGNE / Perspectives
Un article de Manu Gros dans la Provence du 12 février dernier, au sujet de l'expo au Musée de l'Archevêché.
lundi 13 février 2017
The Afghan Whigs, Regret
The Afghan Whigs, "Faded", album Black love
"Faded", ultime titre de l'album Black Love des Afghan Whigs, sorti en 1996
dimanche 12 février 2017
Un article de Michel Morin à propos de l'exposition FAIS MOI UN SIGNE
Michel Morin nous a fait l'amitié d'écrire ses impressions au fil d'un parcours de l'exposition du Musée de l'Archevêché. Il m'autorise à le publier ici:
Dans
la très riche variété des supports et des
choix de la création, des œuvres en séries invitaient le visiteur à approcher
la recherche dans la production artistique. Un peintre présentait 7 esquisses
sur le sculpteur du Triomphe de la République, Aimé Jules Dalou. 7 tableaux de
femmes sur fond noir se détachaient sur un mur blanc. Leurs yeux fixaient le
spectateur et leurs mains étaient porteuses d’une carte retournée. Cette carte
pouvait être identifiée dans les arcanes
du tarot de Marseille. Les 7 tableaux présentaient en transparence des images
effacées de l’histoire de l’art. 21 mains illustraient avec précision le geste
graphique du dessin. Quatre photographies en deux diptyques montraient la
brutalité du passage de l’animal à sa consommation proprement empaquetée de
plastique et ce parcours à étapes se terminait dans une cabane noire fermée où se
jouait en bruits et en zapping l’expérience éprouvante et pourtant tragiquement
comique de l’invasion et de la confusion
des signes.
Pour retrouver le programme des manifestations:
http://imagesentete.blogspot.fr/2017/01/fais-moi-un-signe-demandez-le-programme.html
Article Michel Morin - Photos Florence Laude et Marie-Agnès Chaléas
Au Palais de l’Archevêché-Musée des Tapisseries :
Fais–moi un signe.
Au premier plan, Pierre Vallauri La bonne direction possible
Jusqu’au
19 mars le Palais de l’Archevêché accueille la nouvelle exposition d’art
contemporain des Plasticiens de Perspectives. Jeudi soir avait lieu le
vernissage de cette étonnante présentation. Plus de 350 personnes sont venues
découvrir les insolites rencontres qu’on
pouvait faire dans la salle gothique du musée. Après avoir descendu quelques marches
on se trouvait d’emblée sollicités par les
grandes affiches peintes de Raymond Galle, forêts cachant des mots
disparus, exilés dans l’errance d’une mer brumeuse. On pouvait poursuivre en s’arrêtant
sur l’image précieuse et discrète d’un livre brodé. Par contraste on se
laissait alors attirer par un duel de signes mis en scène par deux personnages
en élégants costumes de plumes pendant qu’au loin apparaissait un géant prostré
en attente, signalé par une longue flèche clignotante. Un tableau invitait à la
joie du partage entre un homme et une femme. Un doigt de fer pointé vers les
images des agressions publicitaires dans la nuit criait « réveillez-vous » La
force nouvelle d’un ex-voto dessinait
une prière pour un regard.
Raymond Galle, Après les violences de la nuit
Odile Xaxa D'ombre
Jean-Luc Bibolini Réveillez-vous
Lauretta Bosco et Gérard Rocherieux Sans titre, La vie
Jibé Assey Le duel des signes
Marcelle Benhamou, Ex-voto: prière pour un regard
On
pouvait aussi prendre l’autre allée vers « ce côté- ci du monde » pour
deviner l’appel des immobilisés. On s’engageait alors à questionner la gaîté
d’une danse macabre ou la beauté énigmatique d’une cage à oiseaux ou à
papillons appelant au chant mélancolique de John Lennon. On pouvait méditer sur
la fragilité des barques du salut en
sable et en grillages. On se laissait capter par l’appel de mains sculptées
emprisonnées et criant « liberté » dans le langage des signes. Les traces ordonnées de l’encre
sympathique esquissaient des partitions qui attendaient le musicien. Des livres
noirs brulés invitaient à lire et rechercher ce que dit « fais-moi
un signe. Un kaleidoscope rassemblait l’impétuosité
heureuse-malheureuse des images du temps subjectif .
Pierre Paindessous, Signe signe
Viviane Jouvenot, Fais moi un signe |
Jane Deste, ...juste un signe
Florence Laude, Fais moi un signe
Cagliari, De ce côté-ci du monde Rien que l'appel
Claude Bernus, Série 7 esquisses sur Dalou
Dominique Lepage, Ideal Animal
Méliné Seghomonian, Sequenza
Delphine Moniez, Sans titre
Raphaël Morin, Le dessous des cartes
Au
soir du vernissage, la rencontre des signes était balisée par de jeunes acteurs
en chair et en os, tous vêtus de t-shirt blanc, statufiés et porteurs de
curieuses pancartes sur lesquelles était écrit « faites moi un clin
d’œil », « faites moi coucou », « tirez une carte »
« Frappez dans vos mains ». Ces injonctions entraînaient des réponses
mimées. Les jeunes comédiens de la Compagnie d’Entraînement du Théâtre des Ateliers
d’Alain Simon s’étaient fondus dans l’espace d’exposition pour mieux faire
signe aux arrivants.
Les jeunes comédiens de la Compagnie d'entraînement du Théâtre des Ateliers d'Alain Simon (ces deux photos sont empruntées à Marie-Agnès Chaléas)
Après quelques minutes ils se rassemblèrent en levant leurs pancartes et en cortège amenèrent les visiteurs dans l’espace de départ où après une chorégraphie collective ils disparurent pour laisser place aux discours d’accueil de la directrice du musée Valérie Brotons et de la présidente de Perspectives Jeanine Mège. Il devint clair alors que ce vernissage n’était qu’un début. La transdisciplinarité marquant le rassemblement des plasticiens allait se prolonger jusqu’au 19 mars par de nombreux événements présentés sur des dépliants-flyers. Ces événements allient spectacles et conférences en faisant appel à la musique, au cinéma, à l’architecture, la poésie, la choréologie, la danse, la littérature, la linguistique.
Laure Rivoal, série Marionnettes
Après quelques minutes ils se rassemblèrent en levant leurs pancartes et en cortège amenèrent les visiteurs dans l’espace de départ où après une chorégraphie collective ils disparurent pour laisser place aux discours d’accueil de la directrice du musée Valérie Brotons et de la présidente de Perspectives Jeanine Mège. Il devint clair alors que ce vernissage n’était qu’un début. La transdisciplinarité marquant le rassemblement des plasticiens allait se prolonger jusqu’au 19 mars par de nombreux événements présentés sur des dépliants-flyers. Ces événements allient spectacles et conférences en faisant appel à la musique, au cinéma, à l’architecture, la poésie, la choréologie, la danse, la littérature, la linguistique.
Michel Morin (6 février 2017)
Pour retrouver le programme des manifestations:
http://imagesentete.blogspot.fr/2017/01/fais-moi-un-signe-demandez-le-programme.html
Article Michel Morin - Photos Florence Laude et Marie-Agnès Chaléas
samedi 11 février 2017
Préface du catalogue FAIS MOI UN SIGNE, par Pierre-Jean Dessertine
Pierre-Jean Dessertine, philosophe, a fait à l'association Perspectives, l'amitié d'accepter de préfacer le catalogue de l'exposition. Il m'autorise à présenter son texte ci-après.
Fais-moi un signe. C’est sous cette sollicitation, ainsi formulée
de manière personnelle mais indéterminée – ce « moi » pouvant être
n’importe qui – que sont réunis plusieurs plasticiens pour donner à voir (mais
aussi à écouter, à lire, à interagir) les œuvres qu’elle a, en chacun,
suscitées.
Mais que des artistes se
retrouvent pour créer et exposer sur le thème Fais-moi un signe, cela ne nous fait-il pas déjà signe sur notre
époque ?
Commençons par reconnaître que
nous nous sentons personnellement impliqués dans ce « moi » qui
réclame un signe. Or le « nous » ici sujet embrasse la condition
humaine contemporaine très commune de vie dans un environnement artificialisé
saturé de signes : profusion des messages publicitaires et de propagande,
multiples objets dont autrui expose la possession, mise en scène des corps dans
l’espace public, omniprésence des écrans qui adressent à nos consciences un
flux concentré, et le plus continu possible, de signes.
De quel signe manquerions-nous
donc ?
Ne faut-il pas rapporter la
résonance intime de la demande Fais-moi
un signe à notre empathie humaine pour l’autre qui est en détresse du fait
de l’injustice exacerbée d’un monde qui est prioritairement ordonné pour que
prospèrent les flux de marchandises ?
"Tea-Bag resta longtemps ainsi sans bouger, assise sur le lit de camp,
les pieds par terre, le temps que la force se présente et l'emplisse, la force
de traverser une journée de plus dans ce camp rempli de gens obligés de nier
leur identité et qui passaient leur temps à guetter, contre toute évidence, un
signe qu'ils étaient les bienvenus quelque part dans le monde."
(Henning Mankell, Tea-Bag, 2007)
Fais-moi un signe. Le signe à faire serait de bienvenue : bienvenue
parmi nous au sans nom pour qu’il retrouve son nom qui le fait reconnaître pour
ce qu’il est et ce qu’il peut nous apporter.
Mais au-delà de ce sentiment
généreux, il se pourrait qu’il y ait un enjeu plus profond.
« Tout homme fut enveloppé d'abord dans le tissu humain, et aussitôt
après dans les bras humains ; il n'a point d'expérience qui précède cette
expérience de l'humain ; tel est son premier monde, non pas monde de choses,
mais monde humain, monde de signes, d'où sa frêle existence dépend. »
(Alain, Éléments de philosophie,
1916)
Le philosophe nous rappelle que
notre première pensée de sujet humain fut dans la quête Fais-moi un signe parce que notre survie en dépendait. L’accueil
physique de la mère nous donna la première compréhension d’un signe, et ce fut
un signe de bienvenue dans le monde. Et c’est à partir de ce signe inaugural
que s’est développée notre capacité de faire signe et de saisir des
significations.
Le signe humain – il y a beaucoup
de signes non humains très utiles par ailleurs – est fondamentalement de
bienvenue, c’est pourquoi il implique toujours la reconnaissance de la
singularité d’autrui, et c’est pourquoi aussi il lui apporte de la joie, ce qui
signifie, nous montre Spinoza, qu’il lui donne plus de « puissance d’agir » dans le monde.
Fais-moi un signe. N’aurions-nous pas, dans le monde tel qu’il est
et devient, en notre impuissance à avoir prise sur lui pour en modifier le
cours, un criant besoin de signes de bienvenue ?
Qui peut répondre ? Dans
« bienvenue » il y a le mot « bien », ce qui signifie que
le signe sollicité peut venir de quiconque a quelque chose à nous dire sur le
bien que peut apporter ce monde en lequel nous sommes invités à prendre part.
Que soit évoquée ici la place éminente que peut prendre l’œuvre artistique.
L’œuvre artistique est un signe. Mais c’est un signe symbolique, c’est-à-dire
qu’il met en scène un aspect de la condition humaine en touchant la sensibilité
de telle manière que sa signification se déploie dans la résonance infinie des
imaginaires de chacun. L’œuvre d’art est entre toutes précieuse car elle permet
d’ouvrir ses désirs les plus intimes sur la pensée d’un bien universellement
partagé.
C’est pourquoi, puisque c’est
aussi notre quête, nous pouvons accueillir les œuvres exposées comme autant de
réponses à la demande-thème Fais-moi un
signe.
Et, effectivement, nous
retrouverons dans ces œuvres les différentes dimensions que nous avons évoquées
– l’ambivalence du signe, humain ou non-humain, proliférant ou rare – la
condition propre de l’homme contemporain, errant sans nom ou dévastateur
anonyme de la biosphère – la possibilité du signe sollicité, comme lorsque
notre petite puissance d’agir peut engendrer de grands effets ou comme lorsque
la reconnaissance d’autrui franchit l’obstacle du masque.
Ces remarques n’épuisent en rien
la richesse de la vingtaine d’œuvres exposées. Car ce qui est ainsi porté à la
flamme de notre sensibilité brille d’éclats inédits que seul notre imaginaire
peut lui renvoyer. D’autant qu’en leur mise en espace commun les œuvres
elles-mêmes se font signe, et nous font signe qu’elles se font signe.
De leur fréquentation on peut
sortir en se sentant un peu plus bienvenu(e) dans le monde, ce qui est
d’ailleurs le bien que l’on peut attendre de toute œuvre d’art. Mais par la
dimension réflexive de son thème Fais-moi
un signe – puisque l’œuvre d’art est elle-même un signe humain – cette
exposition peut aussi nous apporter une nouvelle lucidité sur ce que sont les
bons signes, ceux qui augmentent notre puissance d’agir.
C’est donc de nous sentir un peu
moins impuissants concernant le monde tel qu’il est et tel qu’il devient que
nous saurons être bien venu(e)s en cette exposition.
Pierre-Jean Dessertine
On peut suivre les publications de Pierre-Jean Dessertine sur son blog: L'antisomnambulique :
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