mercredi 19 décembre 2012

Kamel Khélif et Alain Puech, visite guidée




La semaine dernière, c'était un mardi, les élèves d'une classe de première du lycée Fourcade de Gardanne étaient en visite au musée Arteum. J'avais demandé à Pierre Vallauri, commissaire de l'exposition "traits...intimes" réunissant les dessins d'une douzaine d'artistes contemporains, la possibilité  de permettre aux élèves de rencontrer certains artistes. C'est ainsi que Kamel Khélif et Alain Puech étaient présents pour dialoguer avec les élèves,  leur parler de  leurs oeuvres et, plus généralement, du dessin. Nos élèves n'ont pas l'habitude de fréquenter les musées ou de s'intéresser aux arts plastiques, sauf pour quelques uns qui pratiquent eux mêmes le dessin, raison pour laquelle je souhaitais la présence d'artistes, afin qu'ils aient la chance  d'entendre d'autres interlocuteurs que leurs professeurs. L'exposition  "Traits...intimes", au musée Arteum de Châteauneuf-le- Rouge, est visible jusqu'au samedi 22 décembre.
De nombreuses questions sur les techniques employées, sur le sens donné aux oeuvres ont été posées à Alain Puech, artiste plasticien qui travaille depuis 2008 à la réalisation quotidienne d'un autoportrait.  Ce travail a séduit plusieurs lycéens. Nicolas écrit :" j'aime de manière générale l'idée d'autoportrait, mais un dessin m'a particulièrement marqué: le dessin faisant référence à une anecdote de sa vie. Un jour il a reçu une publicité  pour les produits "Damart", adressée à "madame Puech" alors qu'il n'est pas marié. Il a alors utilisé la publicité pour réaliser son autoportrait. On voit le visage d'Alain Puech travesti en femme âgée, avec quelques rides légèrement  tracées et un grain de beauté sur le côté droit du visage, près de la bouche".  Un autre élève, Guillaume,  ajoute: " j'ai bien aimé les oeuvres d'Alain Puech. Ses dessins racontent une histoire, celle de sa vie, car il se dessine tous les jours. Celui qui me plaît vraiment c'est celui où il est représenté en "avatar". Pourquoi est-il en "avatar"? Car il est allé le jour même voir le film. Cette méthode, je la trouve vraiment ingénieuse. Il utilise toujours le même type de feuille pour ses dessins ". 
 
 Le soir même de notre visite au musée Alain Puech  a réalisé un autoportrait (celui que je présente ici),  et comme il l'avait annoncé aux élèves, il s'est servi des photos que nous avions prises durant l'après midi pour composer, par superposition, son autoportrait.  Il m'a envoyé le dessin par mail et je l'ai montré le lendemain matin à la classe.  Ce fut un moment d'émotion.  Après un silence attentif, une voix a dit : "nos photos ont servi à faire une oeuvre, nous sommes devenus une oeuvre d'art !" Un murmure approbateur a parcouru les rangs.  Certains élèves dessinent, mais aucun n'avait eu,  jusqu'à cet instant, l'idée de devenir un jour acteur de l'histoire de l'art... Merci Alain, au nom de tous les élèves.

Kamel Khélif s'est longuement entretenu avec la classe, de la place du dessin dans l'histoire des arts, place qui a beaucoup évoluée depuis l'époque où il était seulement considéré comme un  brouillon ou une étude imparfaite avant l'oeuvre "noble", la peinture. Les dessins ne s'exposaient pas, alors, ils étaient détruits la plupart du temps. Il a parlé de son propre parcours, de sa  technique personnelle.  Auteur et dessinateur de bandes dessinées, Kamel Khélif a également une oeuvre dessinée qu'il présente en galerie.


Yohan, qui a aimé un dessin de Kamel Khélif, écrit: " J'ai beaucoup aimé l'oeuvre sans titre où l'on voit un loup, dans le  centre, à gauche du dessin. Le rendu du dessin dans des tons bruns chaleureux et le rendu des traits fins du rotring sur la feuille patinée me plaisent énormément, ainsi que la manière dont  il superpose des tissus qui rendent l'oeuvre plus vivante ( en fait il n'y a pas de tissus superposés dans les dessins, mais, parfois, Kamel  dessine au point plutôt qu'au trait,  et cela peut  laisser penser qu'une légère dentelle blanche vient par dessus le dessin des lignes). L'ensemble donne un effet de brouillard qui rend le dessin mystérieux. Le côté de  la feuille qui semble patiné illumine le dessin et on dirait qu'il y a une pleine lune cachée par le brouillard. On aperçoit aussi un autre loup tout un haut du dessin, on dirait qu'il a été appelé par le premier loup pour regarder avec lui ce qui se passe. On aperçoit également des chevaux en bas de la feuille, le loup les surveille. La présence du loup donne un caractère fort à l'oeuvre, il est le chef de la meute, celui qui commande avec  supériorité, depuis le  bord de la falaise.  C'est pour moi la plus belle oeuvre que j'aie vue jusqu'à présent et c'est pour tout cela que je l'aime".
Nombreux sont les élèves de la classe qui ont été réceptifs aux dessins de Louise Lefort, ceux que l'on peut voir sur cette photo, ainsi que le dessin monumental d'un verre d'eau à moitié rempli.  Amandine, Hafi, Guillaume, Léa, Gaëlle, Mathieu, Valentin, Benoît, Marine, ont aimé "Les doigts dans la prise" ou "Le verre à moitié rempli".  Voici ce qu'ils ont pu écrire: " j'aime un dessin de Louise Lefort qui s'intitule "les doigts dans la prise". On peut y voir un bébé assis, en train de jouer, il est sur un tapis, avec des jeux pour enfant, mais il tient une prise électrique en mains. On distingue aussi un sac et une paire d'escarpins. On peut imaginer que le bébé va mettre les doigts dans la prise, comme le dit le titre du dessin, ou bien qu'il va couper le fil. J'ai bien aimé ce dessin car je trouve qu'il reflète la réalité: les bébés sont innocents et inconscients du danger.  Cette oeuvre me plaît aussi car je trouve que tous les détails y sont et qu'ils sont réalistes. Les effets de noir et blanc sont réussis, les jeux d'ombres aussi".   On peut lire aussi : " Le dessin que j'ai le plus aimé est une oeuvre de louise Lefort. C'est un dessin est en noir et blanc, cette absence de couleur me plaît. Il représente un verre sur un support, une table. Ce verre est à moitié vide ou à moitié plein, cela est laissé à l'appréciation de chacun,  traduisant l'optimisme ou le pessimisme  de l'être humain.  Malgré l'absence de couleur et de décor, je le trouve vivant, peut-être parce qu'il reflète la réalité de la vie".
Pauline, Sirine, Morgane, Nolwenn, Marion, Yohan, ont parlé des dessins de Xavier Spatafora.  L'un d'eux écrit: "Ce dessin m'a plu car il est très réaliste. La main représente un des cinq sens, le toucher.  J'ai eu envie de toucher cette main, qu'elle puisse me soulever grâce à sa très grande dimension ( 220 x 180)  et la force que l'on imagine".   Un autre ajoute: "la main qui est représentée peut  avoir la signification que le monde et notre vie sont entre nos mains et cela peut nous indiquer qu'il ne faut pas gâcher sa vie".  Mais pour une autre élève, cela raconte "l'histoire d'un homme qui lâche quelqu'un. La main est penchée vers le bas, le vide, alors que pour d'autres personnes elle peut représenter tout autre chose. Ce que je peux clairement dire, c'est que j'ai apprécié cette oeuvre car elle raconte une histoire".  On lit encore: " j'avais aussi l'impression que la main voulait  entrer en contact avec moi, que celui qui était au bout de ce bas était seul et qu'il ne voulait plus l'être. J'étais vraiment attiré par ce dessin et je ne pouvais plus m'en décoller".    Toutes les oeuvres ont été regardées avec une grande attention. Parmi celles qui ont encore fait couler l'encre des stylos des élèves, il faut citer  Georges Rinaudo,  Fred Deux, Denise Fernandez  dont les portraits ont beaucoup impressionné de la par la technique du dessin, Catherine Duchêne pour ses personnages féminins de Madone et de Marthe, la nudité parfaite des corps de femme a provoqué l'admiration, alors que la technique du fusain sur toile plaisait beaucoup,  Sophie de Garam et Christine Bonduelle, Delphine Poitevin.   Les dessins abstraits de  Pierre Salvan  ont souvent interpellé et parfois décontenancé, car, certains l'ont écrit, les élèves considèrent qu'ils  n'ont pas une grand expérience artistique. Pour la quasi majorité des élèves, un artiste, un dessinateur doit se montrer plus capable de mieux dessiner que toute autre personne. Il doit savoir reproduire parfaitement la réalité. Ils sont sensibles à un art figuratif, voire narratif qui saura toucher leurs émotions.   Sirine a pour sa part écrit: "j'ai bien aimé les oeuvres exposées de Pierre Salvan. Elles sont simples et sans superflu. Chacun peut donner la signification qu'il veut à chaque trait et à chaque couleur. En regardant ces oeuvres, je me sens apaisée et je peux laisser libre cours à mon imagination, en revanche, je ne peux pas expliquer avec des mots ce que je ressens".          Pour conclure, je voudrais remercier  tous les artistes au nom de tous les élèves et plus particulièrement Kamel Khélif et Alain Puech qui ont été tellement généreux dans les moments d'échange avec la classe.  Merci à Pierre Vallauri toujours enthousiaste à partager sa passion  et à encourager la diffusion des oeuvres et des artistes. Merci au musée Arteum de nous avoir accueillis.  Merci à chacun des élèves de la classe et à celles et ceux dont le nom n'a pas encore été cité: Fiona, Charlène, Emma, Alexandre, Thomas, Anaïs, et Mélanie. 

1 commentaire:

pierre vallauri a dit…

A mon tour de te remercier pour avoir conduit jusqu'au musée tes élèves et de nous rapporter leur commentaires. C'est ainsi que l'art et son dess(e)in avance dans les consciences construisant ainsi un meilleur avenir.
Je renvois ce blog via les artistes qui contribuent ainsi à cette avancée.Ils auront plaisir à lire ces témoignages.