lundi 3 avril 2017

Stephan Fernandez expose à galerie "Les Frangines", à Toulon

Lisa et Davia, "Les  Frangines", ont ouvert sur Toulon, il y a quelques mois, une galerie d'art qui voit son succès grandir au fil des expositions. A l'intersection de la rue de Pomet et de la rue des Arts,  dans la basse ville, près de la Maison de la Photographie, la rue connaît aujourd'hui une métamorphose. L'ouverture de plusieurs galeries transforme le quartier et j'ai ressenti un intérêt sincère et une certaine fraîcheur dans l'enthousiasme des visiteurs nombreux et pour la plupart jeunes, le soir du vernissage.  Il y a de quoi se réjouir et avoir envie d'être solidaire de l'aventure  qui se veut à la croisée des possibles, à la fois atelier d'artiste et galerie.

Invité dans cette exposition collective, Stephan Fernandez expose des toiles de grand format 167x114cm,  jusqu'au 28 avril.  Retrouver les infos de la galerie sur leur site facebook : https://www.facebook.com/LesFranginesetvous/


Stephan Fernandez travaille avec les matières, la couleur  et le temps.  
Les toiles, chargées de matières minérales et de pigments, donnent l'impression de mettre sous nos yeux des pans de vieux murs délabrés qui, comme le dit ce vers de Rimbaud, exhiberaient "[...] un fouillis de vieilles vieilleries", que le poète contemple avec une tendresse émue.  Lui, Rimbaud, termine son poème "Le Buffet" sur ces trois vers:

-Ô buffet du vieux temps, tu sais bien des histoires
Et tu voudrais conter des contes, et tu bruis
Quand s'ouvrent lentement tes grandes portes noires.
  "Le Buffet", octobre 1870- Les cahiers de Douai - Arthur Rimbaud

Pareillement, les peintures de Stephan Fernandez nous content des histoires, elles sont des livres ouverts.  Comme les grandes portes d'un buffet, elles donnent à lire des signes gravés dans l'épaisseur de la matière. Signes constants, à l'instar des dessins tracés sur les parois des grottes depuis la nuit des temps, mais renouvelés à chaque génération d'enfants, à l'identique. Signes de tous les âges et donc  signes sans âge,  antérieurs à l'apparition des langues, ils parlent à l'homme comme les mythes.

Dans les toiles de Stephan Fernandez,  ce qui est à la surface ne peut pas être confondu avec le superficiel, mais procède au contraire de la  remontée des couches profondes, qui par quelque retournement de situation, par quelque hasard de l'histoire et volonté de l'artiste sont ramenées à la surface.  La toile est comme une paroi blessée, pelée, "comme une cicatrice de la nuit / Et qui n'en finit pas de se rouvrir". ( Léo Ferré, "Cette Blessure")

La saignée, la déchirure, la fente, l'écorchure, la fracture, la faille, la fissure sont des accidents naturels dans le paysage, mais des gestes volontaires chez l'artiste.  L'artiste, quand il crée, provoque le hasard, il ne le subit pas, il le guette, le prépare,  le retient, le provoque,  reconnaît quand il lui est utile et nécessaire et nous le rend visible. Le travail  de l'artiste disparaît et ne livre à nos yeux que son évidence, quand il est terminé.
Les couleurs sont aux émotions, ce que la matière est à la sensualité, ici elles sont tendres et vives, acidulées et fraîches comme un printemps, mouillées, rugueuses, blanchies comme la pierre au  soleil d'été, écorchées comme un genou qui saigne, brûlées comme un charbon de bois.
Les murs ont des oreilles et les toiles racontent des histoires,  bouches ouvertes par où "les couleurs et les sons se répondent". ( Baudelaire, "Correspondances")
Il faut voir cette exposition, jusqu'au 28 avril, galerie "Les Frangines", à Toulon.  Pour plus de renseignements cliquez ici: https://www.facebook.com/LesFranginesetvous/?hc_ref=PAGES_TIMELINE

Le site de l'artiste: https://copito.carbonmade.com/



Si on veut écouter la chanson de Léo Ferré, "Cette Blessure"


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