lundi 25 février 2019

"Daniel Darc, Pieces of my Life" un long métrage sur Daniel Darc réalisé par Marc Dufaud et Thierry Villeneuve

Hier soir, au cinéma La Baleine, cours Julien à Marseille, projection du film réalisé par Marc Dufaud et Thierry Villeneuve sur Daniel Darc, dans le cadre du festival FAME, festival de cinéma consacré à la musique et aux pop cultures.  Une projection dont on a du mal à sortir tant le personnage et l'atmosphère du film sont captivants, nous entraînant dans une déambulation singulière, très près de l'artiste et du personnage complexe et attachant, construit par Daniel Darc. C'est le quatrième film que Marc Dufaud consacre à Daniel Darc qu'il a suivi et filmé pendant vingt-cinq ans. Le montage pensé et réalisé avec Thierry Villeneuve est très  intéressant. 
Le film sortira en salle cette année et je pense qu'il mérite vraiment d'être vu. 


Teaser du film Daniel Darc, Pieces of my Life paru en 2017, pendant le montage du film.  

       Marc Dufaud réalise ici son quatrième film sur Daniel Darc, après Le Garçon Sauvage (1993) et Les Enfants de la Blank (1994) et Rêve Coeur, à la sortie de l'album Crève Coeur (2004). Les images utilisées dans le film sont choisies parmi toutes les images filmées par Marc Dufaud pendant vingt-cinq ans, des formats de films différents, parfois des images que l'on dirait imparfaites, mais qui font justement une des qualités du film, tant il apparaît de poésie et de justesse à révéler sans dévoiler Daniel Darc, quand le grain devient moins fin.  Quelque chose de sensible et de plus fragile passe dans ces artefacts, comme si l'imperfection de l'image soulignait les doutes du personnage. L'image de Daniel Darc est quasiment omniprésente, le questionnement sans fin.... et on obtient peu de réponses, comme si c'était du film en train de se faire que Daniel Darc attendait quelque lumière sur ses ombres profondes. Il y a une scène du film où il demande à ceux de l'autre côté de la caméra de lui indiquer comment il doit se placer, avec insistance, qui est très révélatrice de cette quête d'un sens dans l'image de soi.  L'image (les images) de Marc Dufaud semblent  saisir quelque chose de plus juste en n'étant pas uniformisées, elles laissent la quête en quelque sorte inaboutie, tout en la soulignant, elles montrent sans mettre à nu, elles laissent affleurer les aspérités de l'homme. 

      Le montage est aussi très intéressant, commis par Thierry Villeneuve et Marc Dufaud,  toujours oblique et non linéaire, il ne tend pas à vouloir donner un sens ou délivrer un message qui prétendrait dire une vérité sur Daniel Darc. Ils parviennent à donner l'impression de ne pas organiser le désordre de la vie de Daniel Darc, les noirs et les blancs d'une existence qui s'accomplit, les ellipses entre les images, comme failles, pour rendre sensible que la vie est comme un brouillon d'elle même, qu'elle avance  en se cherchant, que de magnifique pépites en jaillissent dans des fulgurances... Ajoutons que ce film si proche de Daniel Darc témoigne aussi pour une génération et pour l'histoire de la musique. 

       Je suis déjà trop bavarde, il suffit d'applaudir pour dire l'émotion que ce film provoque.  Merci.

On apprend que le titre du long métrage (1h40) est  repris d'un morceau d'Elvis Presley, dont Daniel Darc était fan. 




"Pieces of y life", Elvis Presley, album Today, 1975




"J'irai au Paradis", album Amours Suprêmes, 2008





"Nijinsky", album Nijinsky, 1994

Sur Thierry Villeneuve: https://www.thierryvilleneuve.fr/

dimanche 24 février 2019

samedi 16 février 2019

Fermeture de l'atelier de Georges GUYE

Georges Guye quittera l'atelier qu'il occupe depuis 27 ans à Marseille, 2 rue Francis Chirat, à la fin du mois de février.  Samedi 16 et dimanche 17 février il ouvre les portes de l'atelier et propose une vente à prix bradés d'un grand nombre de ses sculptures. Une dernière visite et quelques photos qui seront  comme des yeux toujours ouverts pour se souvenir du lieu et des sculptures qui trouveront un nouveau domicile chez des collectionneurs.  L'atelier est ouvert ces deux jours de 15h à  19h et, si besoin on peut appeler au 04 91 90 59 99.


 Paysages en plâtre 

 canapé et tabouret "figues" et "une belle brochette" 


 Le drame du Heysel


 Les grandes mers, les baigneurs et  promenade au lac


 La liseuse



Autoportrait au manteau 


(merci à  Lucie Vallauri, pour la photo)



 Femme sous la douche




 Le défilé de mode


 Bustes d'Aixoises









 Deux critiques se disputant une cagette devant la fromagerie Paul


After shave, Le sourire de Gaby et Une belle brochette


 Le sourire de Gaby (collection particulière)


 Le saut à la perche


 La fille en jean



































"A body", Lionel Gabel (soundcloud)

Lionel Gabel "A body", dessin, paroles et musique
Pour écouter cliquez sur le lien


dessins, Mark Lanegan.



Mark Lanegan est un musicien américain, ex-membre des Screaming Trees (1986-1997), à partir des années 1990, il développe une carrière solo et a sorti une douzaine d'albums, The Winding Shit (1989), Whiskey for the Holy Ghost (1990-1994), Scraps at Midnight (1997-1998), I'll Take Care of You (album de reprises 1999),  Field Songs (2000-2001),  Houston publishing Demos 2002 (sorti en 2015), Here comes That Weird Chill  (2004), Bubblegum (2003-2004), Blues Funeral (2012), Dark Mark Does Christmas (reprises, 2012), Imitations (reprises, 2013), Has God Seen My Shadow (anthologie, 2014), Phantom Radio (2014), Gargoyle (2017). Il a collaboré, entre autres,  avec Queens of the Stone Age (2001-2013), Soulsavers (2007),  Isobel Campbell (2005), Greg Dulli dans le groupe Twilight Singers  et The Gutter Twins (2008),  Alain Johannes, et avec le musicien et guitariste Duke Garwood sur les albums Black Pudding (2013) et With Animals(2018). La liste des collaborations est pléthorique (https://fr.wikipedia.org/wiki/Mark_Lanegan)  et celle des reprises encore plus impressionnante (https://www.setlist.fm/stats/covers/mark-lanegan-73d68ab9.html?fbclid=IwAR3c9eznZAdPbkrBwLeWRkXH47mih2-kTeYi8DvIHKKYZ4f1gusMzhDeCDA). 


J'ai réalisé une petite série de dessins suite à une demande que j'ai vu passer pour des portraits en noir & blanc. Je ne m'étais encore jamais risquée à dessiner des portraits d'artistes que j'aime écouter, préférant dessiner sur le vif que d'après photos, mais c'était une occasion de sortir les feutres et l'encre noire. 
Une prochaine fois je posterai un article avec un morceau de chacun des douze albums solo de Mark Lanegan, et ça c'est beaucoup plus intéressant !   En attendant on peut, avec ce lien, retrouver  un article que j'avais écrit à l'occasion de la sortie de l'album Gargoyle (2017)





























































Flo Laude

dimanche 10 février 2019

Et même si c'est la nuit, Kamel Khélif, BD à paraître en avril 2019 aux éditions Otium

En juillet 2017, Kamel Khélif me montrait les planches d'un livre qu'il était en train d'écrire et de dessiner. A l'époque, il s'intitulait Nuit sans faim, il est maintenant en cours d'impression et  paraîtra le 11 avril aux éditions Otium, distribué par Hobo.

Et même si c'est la nuit, Kamel Khélif, éditions Otium, 11 avril 2019, BD,  30€








 Voici ce que j'écrivais en juillet 2017, après avoir lu une impression du manuscrit et vu la première moitié des planches de l'album dessinées.  Pour le plaisir, je publie à nouveau des photos de  quelques planches.

Kamel Khélif, mercredi 12 juillet 2017,  Nuit sans faim

Dans l’après-midi le soleil brûlant de juillet est rafraîchi par le vent, je me gare à la Plaine et rejoins le cours Lieutaud, Kamel Khélif, habite juste à côté.  Dans sa rue, des hommes discutent devant le pas de la porte, côté ombre. Je monte les quatre étages, Kamel habite au dernier, la lumière traverse l’appartement, fenêtres orientées est-ouest, le soleil reste longtemps l’après-midi. Je l’ai appelé pour lui demander s’il envisagerait d’exposer à nouveau avec l’association Perspectives pour l’exposition du cinquantenaire, fin décembre. Je lui ai proposé de choisir des dessins qu’il voudrait exposer, pour les photographier et il a accepté.  Dans l’appartement de Kamel, les dessins, sont omniprésents, les livres aussi.  Les planches en cours de réalisation sont posées à plat sur les cartons à dessin ouverts et sur le divan, pour sécher.  Etant toujours visibles, disponible au regard,  elles nourrissent le travail en cours.  Au téléphone, Kamel m’avait dit qu’il préparait un livre, Nuit sans faim,  le récit d’une errance dans la nuit ... Plus de vingt-cinq pages sont dessinées, format 44 x 64 cm, deux dessins par page, attachant le récit graphique  au rythme des pas du personnage, un dessinateur, errant dans la ville, d’un bout de la nuit à l’autre.





Kamel m’avait dit : J’ai l’impression que ce récit fait  écho à mon premier livre, Homicide (éditions Z’éditions, 1996, dessins de Kamel Khélif sur un texte d’Amine Medjdoub). Une BD polar où l’on se demande si le personnage a vraiment commis un crime ou si cela n’est que le fruit de son imagination.  Un rêve ?   Nuit sans faim, s’attache aux pas d’un personnage-narrateur-dessinateur (un double de Kamel ?), le récit débute lorsque la nuit qui envahit de sa pénombre l’appartement ne permet plus à l’homme de continuer son dessin : « Il cessa de dessiner, lorsqu'il s'aperçut que la lumière du jour avait presque disparu de la surface de la feuille et se confondait à présent à l'obscurité du dessin ».  C’est alors que poussé par un appel intérieur, que l’on pressent être de la même force que celle qui le tient penché sur ses dessins dans la journée,  il descend dans les rues de sa ville, Marseille.

Il déambule d’un lieu familier à un autre, chaque escale est l’occasion de  croiser   des hommes et des femmes, prétexte à évoquer les  destins blessés de  tous ceux qui ont voulu partir, se libérer, espérant qu’ailleurs on pourrait construire une vie meilleure ... On entend les paroles de cette chanson dans le texte :

« reviens sur tes pas, vie vécue
 fais-moi voir à nouveaux
 cette vie perdue
 que jamais je n'ai su vivre »






C’est la nuit que l’on perçoit les lumières intérieures de ces présences diaphanes qui brûlent et vacillent. La nuit est onirique, le récit divague avec légèreté, épousant le déséquilibre qui propulse le rêve, déambulation en mode aléatoire dans la mémoire, éveillant des souvenirs d’enfance... mais buttant aussi sur la réalité.  L’errance de toute une nuit débute avec le noir qui envahit l’espace et se clôt aux premières lueurs du jour, elle  emmène et ramène le personnage à sa page dessinée ...

Finalement, a t-il vraiment quitté l’appartement ? N’est-ce pas  la contemplation des planches dessinées qui livre toutes ces histoires ?  Quand on a accumulé un certain nombre d’expériences est-il encore besoin d’aller à la rencontre de la réalité ?  Peut-être est-on devenu soi-même un puits dont les eaux noires et profondes suffisent à étancher sa soif du monde ? Peut-être suffit-il de regarder au fond de ce puits, sous le reflet de la lune pour puiser toutes les existences noyées dans la peine et l’amertume d’une eau salée, amère. Du soir au matin, comme d’une rive à l’autre, comme d’un bout à l’autre d’une existence. Au fond de chaque existence, aussi noire, aussi sale, aussi terne soit-elle, brille la lumière d’un rêve, d’un idéal qui s’est maladroitement heurté à la réalité... c’est ce que je trouve dans Nuit sans faim. Un récit polyphonique. Un récit ouvert à plusieurs choix de lectures ... sans exclure le récit autobiographique, sans s’y limiter non plus. Un récit en boucle





Pour dessiner ces planches, Kamel cherche dans le noir de l’encre, fait de pigment, d’huile et d’essence de térébenthine répandus sur le papier,  la lumière du trait.  Dans la tache, il creuse, arrache, décolle, avec toutes sortes d’outils, même les plus simples. Dans le noir il cherche les formes qui conviennent à son imagination, au récit en cours.   Et puis, bien sûr, il superpose les couches de peinture, cache, révèle, dessine au trait.  La création d’un dessin est complexe, elle demande du temps et beaucoup de travail, parce que c’est le travail et la recherche qui conduisent au dessin, à découvrir des nouvelles techniques qui donnent des images  originales et personnelles au même titre qu’un musicien parvient à créer un univers sonore qui lui est tout à fait propre et par lequel on le distingue et on le reconnaît. On dit qu’il appartient à chacun d’inventer sa vie, Kamel invente son dessin et son dessin est son œuvre, de même que ses livres dont il écrit aussi le texte. 
Nuit sans faim ... lorsque la vie, urgente comme une histoire d’amour, fait oublier la faim, une vie qui se soucie moins des choses matérielles que de la vie intérieure, que de cette nourriture spirituelle, de l’imagination, qui trace un destin. Dans Nuit sans faim, Kamel Khélif écrit  ce souvenir d’enfance, est-il réel, est-il romance ? « Je ne sais plus quand ni comment un jour j'ai ressenti ce froid à l'intérieur de mes os qui me perturbe en ce moment. Un jour j'ai ressenti quelque chose de semblable. Je retournais m'asseoir à ma table. C'était la fin de la journée. J'ouvris à nouveau mon cahier et pris un crayon. Au bas des exercices du jour, je fis un tout petit dessin. Le silence de la page de ce jours-là me garda depuis toujours une place dans le silence. [...]Ce jour-là, je compris comment naissaient les dessins. »
Merci à Kamel Khélif d’avoir partagé avec moi le texte et les premiers dessins de Nuit sans faim.  Je serai à l’affût de la publication de ce livre et j’écrirai un nouvel article à ce moment-là.  Je laisse Kamel à la solitude de la création, peuplée d’images et de magie ... car m’a-t-il dit, image et magie sont bien des anagrammes l’une de l’autre ... Ce dessinateur nous enchante !
Florence Laude, Juillet 2017.

http://imagesentete.blogspot.com/2017/07/kamel-khelif-nuit-sans-faim-mercredi-12.html